Teams ne remplace pas une plateforme d'apprentissage

Cet article analyse Microsoft Teams en tant qu’outil pédagogique et tente de déterminer s’il peut remplacer une plateforme d’apprentissage.

En raison de l’épidémie de COVID-19, les écoles fribourgeoises ont introduit Microsoft 365 avec son composant Teams, pour faciliter la partie à distance de l’enseignement.

Certains voient dans Teams une plateforme d’apprentissage propre à remplacer un véritable LMS comme Moodle.

Voyons pour quelles raisons cet outil, qui offre néanmoins des fonctions intéressantes et utiles, en particulier pour organiser des classes virtuelles, ne fournit qu’un sous-ensemble restreint des fonctionnalités d’une plateforme d’apprentissage.

Qu’est-ce que Teams permet de faire ?

Teams permet aux enseignants de créer des espaces de travail collaboratifs organisés en équipes pour communiquer en temps réel, partager des fichiers ou les modifier en ligne ou hors ligne, seul ou à plusieurs.1

Voici les fonctionnalités essentielles de Teams.

  1. Mettre à disposition des documents.
  2. Donner des devoirs à effectuer, récupérer les travaux et les évaluer si désiré.
  3. Collaborer sur des fichiers, presque en temps réel, mais avec une latence trop importante pour faire de l’écriture collaborative, par exemple.
  4. Chatter en temps réel.
  5. Mettre à disposition des formulaires à remplir par les membres d’une équipe ; il ne s’agit pas de quiz.
  6. Mettre en place des classes virtuelles ou des visio-conférences.

On constate que Teams est plutôt orienté vers des activités synchrones, même s’il dispose d’outils qui lui ont été ajoutés pour combler ses lacunes dans le soutien de la modalité asynchrone de l’enseignement en ligne.

Que manque-t-il à Teams pour en faire une véritable plateforme d’apprentissage ?

Un certain nombre de fonctionnalités importantes font défaut ; un enseignement en ligne complet est ainsi impossible à développer avec Teams :

  • il ne permet pas de suivre les parcours et la progression des élèves ;
  • il n’offre pas la possibilité de consulter les traces des activités des élèves, ni de learning analytics permettant par exemple de détecter précocement le décrochage ;
  • il ne permet pas de ludifier les apprentissages, par exemple à l’aide de badges ;
  • il n’est pas conçu pour organiser des parcours d’apprentissage en ligne structurés ; seule une scénarisation rudimentaire des séquences d’apprentissage est possible ;
  • il ne propose pas de quiz autocorrectifs, ni d’évaluation à distance (formative ou certificative).

En résumé

Teams peut compléter les outils offerts par une plateforme d’apprentissage pour la mise en place du volet synchrone d’un enseignement, surtout grâce à sa fonctionnalité de visio-conférence. Il permet d’interagir en temps réel avec les élèves et d’organiser des classes virtuelles pour soutenir cette importante modalité lorsque l’enseignement en présence n’est pas possible.

De nombreuses grandes institutions utilisent d’ailleurs cette approche : leur plateforme d’apprentissage (Moodle, ILIAS, etc.) est complémentée par Teams pour la classe virtuelle. Par exemple en Suisse l’ Université de Fribourg, la Interkantonale Hochschule für Heilpädagogik de Zurich, l’ ETHZ, et à l’étranger l’ Université de Toulon, l’ Université de Reims et l’ Université catholique de Louvain.

En revanche, Teams n’est pas particulièrement adapté à la modalité asynchrone de l’enseignement en ligne, puisqu’il ne permet pratiquement aucune scénarisation des séquences d’apprentissage.

Par ailleurs, il n’offre aucune fonction de gestion du suivi de la progression des élèves, ce qui est préoccupant, alors même que l’expérience du printemps 2020 lors du semi-confinement a montré que le décrochage scolaire est fréquent lors d’un enseignement exclusivement à distance.

Il serait donc aberrant de remplacer totalement une plateforme d’apprentissage par Teams.

Avec Pierre Dillenbourg2, rappelons-nous que

La clé n’est pas le choix des outils, mais la qualité des activités d’apprentissage à réaliser en utilisant ces outils.

et que

La véritable difficulté de l’utilisation des outils éducatifs numériques ne consiste pas à déterminer « comment lancer ce logiciel », mais à répondre à la question « que puis-je faire avec mes élèves grâce à cet outil ? »


  1. DSIUN, Université de Toulon ↩︎

  2. Rendre l’école plus robuste ↩︎

Sources